
CLAUSE D’AGREMENT DU BAILLEUR ET CESSION DU DROIT AU BAIL
Auteurs : Mehdi El Hadjadj, Muriel Bourlioux, Ghislaine Betton
Publié le :
21/07/2023
21
juillet
juil.
07
2023
Cass. Com. 19 avril 2023, n° 21-20655
Amorce : Lorsque la liquidation judiciaire d’une société est prononcée, le bailleur peut-il s’opposer à la cession du fonds de commerce en faisant valoir la clause d’agrément ?
Par un arrêt du 19 avril 2023, la Cour de cassation est revenue sur le sort de la clause d’agrément du bailleur, lorsque le droit au bail est inclus dans la vente de gré à gré d’un fonds de commerce en liquidation judiciaire.
Rappelons au préalable que, lorsque la liquidation judiciaire d’une société est prononcée, le liquidateur est chargé de la réalisation de l’actif du débiteur afin de désintéresser les créanciers. La réalisation de l’actif peut s’opérer par une cession totale de l’entreprise, mais également par une cession d’actifs isolés comme l’illustre l’arrêt d’espèce.
Conformément à l’article L.642-19 du Code de commerce, la cession d’actifs isolés peut s’opérer via une vente de gré à gré qui doit être autorisée par le Juge-commissaire.
Le droit au bail est évidemment l’un des éléments d’actifs le plus important.
Aux termes du contrat de bail commercial, il est souvent prévu, en cas de cession, une clause d’agrément stipulée au profit du bailleur. Cette clause permet au bailleur d’avoir un réel pouvoir de blocage sur la transmission du droit au bail puisqu’il peut s’opposer à la cession à un preneur qui ne lui conviendrait pas.
Pour cela, encore faut-il que la clause d’agrément trouve son entière efficacité.
Si la clause d’agrément stipulée dans le bail commercial est privée d’effets en cas de cession totale de l’entreprise devant le Tribunal, et ce afin de garantir l’efficacité du plan de cession[1], nous savons toutefois que, s’agissant de la cession isolée du bail autorisée par le juge-commissaire, elle retrouve toute son efficacité [2].
En l’espèce, le droit au bail était inclus dans la cession de gré à gré du fonds de commerce du preneur en liquidation judiciaire.
En effet, une SCI avait consenti un bail commercial à une société placée par la suite en liquidation judiciaire.
Le juge-commissaire avait été saisi par le liquidateur judiciaire qui entendait voir autoriser la vente de gré à gré du fonds de commerce de la société, comprenant le droit au bail. Le bailleur avait cherché à s’opposer à la cession du bail en se prévalant de la clause d’agrément.
Le juge-commissaire, en méconnaissance de la clause d’agrément, avait autorisé la vente, faisant fi de l’opposition du bailleur.
Souhaitant se prévaloir d’une telle clause, le bailleur avait interjeté appel. La Cour d’appel de Paris a confirmé que la vente du bail pouvait s’effectuer sans l’agrément du bailleur.
Intégralement débouté de ses demandes, le bailleur forme alors un pourvoi en cassation.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel et énonce :
- D’une part, qu’en cas de liquidation judiciaire, « la cession du droit au bail, seule ou même incluse dans celle du fonds de commerce, autorisée par le juge-commissaire, se fait aux conditions prévues par le contrat à la date du jugement d’ouverture »,
- D’autre part, que « la clause imposant au cédant des obligations solidaires avec le cessionnaire est toutefois écartée. »
La Cour de cassation réaffirme ainsi une jurisprudence connue. En effet, elle avait déjà jugé que, lors d’une cession d’actifs isolés, la cession du bail, seul ou avec un fonds de commerce, est subordonnée à l’agrément du bailleur si une clause est prévue en ce sens dans le contrat de bail commercial[3].
Dès lors, en cas de liquidation judiciaire du preneur, la cession de gré à gré du droit au bail commerciale comprise dans celle du fonds de commerce doit satisfaire à l’agrément du bailleur, et ce, sans que le liquidateur judiciaire ne puisse y déroger.
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Historique
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