L’indemnisation du créancier à l’initiative de la résiliation anticipée du contrat à durée déterminée
Publié le :
18/12/2025
18
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12
2025
Cass. Com., 3 décembre 2025, n°24-17.537
Lorsque le contrat a été conclu pour une durée déterminée, le terme qui a été convenu doit être respecté par chacune des parties sous peine de sanction.Tel est le principe posé par l’article 1212 du Code civil « lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit l'exécuter jusqu'à son terme. ».
Dans une récente décision du 3 décembre 2025, la Cour de cassation a été amenée à statuer sur le préjudice indemnisable en cas de résiliation anticipée d’un contrat à durée déterminée.
Au cas d’espèce, la société Recyclage de l’Epine a conclu avec la société Valgo un contrat d’entreprise à durée déterminée.
Cependant, cinq mois avant la date de livraison convenue, la société Recyclage de l’Epine a résilié unilatéralement le contrat pour manquement grave de la société Valgo à ses obligations contractuelles.
Par suite, la société Recyclage de l’Epine a assigné la société Valgo en paiement du solde du prix correspondant à la partie non exécutée de la prestation.
La Cour d’appel de Rouen, par un arrêt du 18 avril 2024, a condamné la société Valgo à indemniser la perte de chance d’avoir pu mener à terme le chantier et a estimé cette perte de chance à 90% du montant du solde du marché restant dû.
La société Valgo, a formé un pourvoi en cassation.
Au soutien de son pourvoi, elle se fonde sur l’article 1231-2 du Code civil, lequel dispose « les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après », pour en déduire que consécutivement à la résiliation d’un contrat à durée déterminée, le préjudice indemnisable est constitué par la perte de marge brute escomptée et non pas au paiement du solde du marché.
Par un arrêt du 3 décembre 2025, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la Cour d’appel en ce qu’il a condamné la société Valgo à la somme de 428 376,96 euros correspondant à l’indemnisation de la perte de chance de mener le chantier à son terme.
Au visa de l’article 1231-2 du Code civil et du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a rappelé que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite ou du gain dont il a été privé.
Dans un premier temps, la Cour de cassation a indiqué que dans le cadre d’une résiliation anticipée d’un contrat à durée déterminée, le solde du prix n’est dû qu’en cas d’exécution de la prestation convenue.
Ainsi, la résiliation anticipée n’ouvrait pas droit au paiement du solde du marché.
Dans un second temps, la Cour de cassation a précisé qu’il appartenait au juge d’évaluer le préjudice résultant de cette résiliation.
Et, conformément au principe de réparation intégrale sans perte ni profit cela suppose de « rétablir, aussi exactement que possible, l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation dans laquelle elle se trouvait si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu »[1].
La Cour de cassation a ainsi relevé que le contrat avait été résilié cinq mois avant la livraison convenue et qu’aucun élément ne permettait de contester, qu’à la date de ladite résiliation, la société Recyclage de l’Epine aurait été en mesure d’achever intégralement sa prestation lui ouvrant droit au paiement de l’intégralité du solde du marché.
La Cour de cassation a ensuite souligné qu’en raison de la résiliation anticipée du contrat, la société Recyclage de l’Epine n’avait pas eu à engager les frais afférents à l’exécution du contrat qu’elle aurait supportés si le marché était parvenu à son terme, de sorte que le préjudice subi du fait de la résiliation anticipée du contrat ne pouvait être la perte de chance d’obtenir le paiement intégral du solde du marché.
En effet, en considérant que le préjudice portait sur le solde du marché alors même qu’aucun frais et aucune perte n’avait été engagés par le créancier pour terminer la prestation, les Juges du fond avaient en réalité accordé une indemnisation plus favorable que si le marché s’était poursuivi jusqu’au terme sans résiliation anticipée.
Afin de corriger cette incohérence la Cour de cassation tranche donc la question en indiquant clairement que le créancier ayant résilié le contrat avant le terme convenu, ne pouvait obtenir à titre de réparation le paiement du solde du marché sauf à s’enrichir injustement.
Fort de son expertise, le Cabinet Pivoine Avocats vous conseille et vous accompagne en matière de droit des contrats.
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[1] Cass. Com. 12 février 2020, n°17-31.614
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