Assistance
Suivez-nous
Afin de toujours mieux tenir informés ses clients, le cabinet pivoine dispose d’un espace « extranet » pour partager avec eux les informations et données qui les concernent en toute sécurité.
 
Ils peuvent accéder à leur espace client :
Pour les dossiers judiciaires, sont accessibles notamment les
  • Actes de procédures (assignation, conclusions…)
  • Pièces communiquées dans le cadre de la procédure et aux pièces adverses,
  • Décisions de justice (jugement, arrêts…)
  • Dernières factures.

Pour les dossiers juridiques,
  • Kbis, derniers statuts,
  • Dossiers d’archives,
  • Dernières factures.  
Servitudes : Appréciation d’une servitude par destination du père de famille

Servitudes : Appréciation d’une servitude par destination du père de famille

Auteurs : Virginie Mauve, Bastien Girard Nkouikani et Ghislaine Betton
Publié le : 22/03/2023 22 mars mars 03 2023



Cass. Civ. 3e, 18 janvier 2023, n°22-10.019

Les articles 692 et suivants du Code civil définissent la destination du père de famille comme un mode d’établissement de servitude lorsque le propriétaire de deux fonds prévoit des aménagements spécifiques tels que l’un des fonds est affecté au service de l’autre. 

Lors de la cession de l’un des fonds à un tiers, ce « service » peut être maintenu de sorte qu’il en résulte une servitude légalement établie entre les deux fonds. 

Ainsi, l’aménagement qui a été maintenu par le propriétaire unique de fonds devient une servitude lors de la cession ou de la division d’un des fonds à condition qu’il y ait des signes apparents de la servitude et que l’acte de cession ou de division ne prévoit aucune stipulation contraire à son maintien (cf. Cass. civ. 3ème, 23 mars 2022, n° 21-11.986).
En résumé, la constitution de servitude par destination du père de famille suppose 4 conditions : 
1. l’identité de propriétaire
2. un aménagement du fait du propriétaire d’origine
3. l’existence de l’aménagement lors de la division des fonds 
4. et l’absence de volonté contraire du propriétaire au moment de la division
En l’espèce, une société était l’unique propriétaire d’un fonds et y avait aménagé un passage pour permettre l’accès à l’ensemble du fonds. 

Elle a procédé à la division puis à la cession de ce fonds au travers de plusieurs actes :
  • Un couple riverain a acquis une partie du fonds par acte du 4 octobre 2002 
  • Une copropriété voisine a également acquis une partie du fonds par acte du 3 septembre 2004.
A la suite de ces divisions et cessions, le passage se situait sur une parcelle appartenant à une SCI tierce. 

Il permettait d’accéder à différentes places de stationnement situées sur le fonds du couple et sur celui de la copropriété. 

Un litige entre voisins a conduit la SCI tierce à entreprendre des travaux de clôture ayant pour effet d’interdire l’utilisation du passage par les riverains.

Dans ce contexte, le couple et la copropriété ont chacun assigné la SCI tierce en invoquant, à titre principal, l’existence d’une servitude par destination du père de famille au bénéfice de leurs fonds respectifs et, subsidiairement, l’existence d’un chemin d’exploitation.

La Cour d’appel d’Amiens, par un arrêt du 2 novembre 2021, a débouté le couple et la copropriété de leurs demandes. 

Elle a écarté l’existence d’une servitude pour la copropriété au motif que l’acte du 3 septembre 2004 contenait une stipulation contraire à l’existence d’une servitude de passage par destination du père de famille (cf. Cass. civ. 3ème, 6 septembre 2018, n° 17-21.527). 

Elle a également écarté la constitution d’une servitude pour le couple en relevant qu’au moment de la division du 3 septembre 2004, leurs parcelles ne faisaient déjà plus parties du fonds unique car ils en étaient devenus propriétaires par acte du 4 octobre 2002. 

La copropriété comme le couple se sont pourvus en cassation.

La copropriété a argumenté que la stipulation contraire à l’existence d’une servitude contenue dans l’acte du 3 septembre 2004 était une simple clause de style selon laquelle l’ancien propriétaire déclarait n’avoir créé ou laissé acquérir aucune servitude. Elle ne pouvait donc produire aucun effet.

Les seconds mettaient en avant le fait que les juges d’appel n’auraient pas dû apprécier l’existence de leur servitude lors de la division du 3 septembre 2004 mais dès la première division intervenue au jour du retrait des parcelles à leur profit, soit le 4 octobre 2002.

La Cour de cassation devait ainsi se prononcer sur deux questions : 
  • d’une part, sur les effets d’une clause de style sur la constitution d’une servitude par destination du père de famille,
  • d’autre part, sur la date d’appréciation des conditions d’existence par destination d’une telle servitude.
Sur la date, la Haute juridiction va rappeler que l’existence d’une servitude par destination du père de famille doit s’apprécier au jour de la division des fonds concernés. 

Dès lors, la Cour d’appel qui a examiné l’existence de la servitude à une date postérieure à l’acte ayant procédé à la division viole les articles 693 et 694 du Code civil. 

Le raisonnement porté par le couple a donc emporté cassation de l’arrêt.

Sur la clause de style, la jurisprudence, par le passé, avait déjà pu retenir qu’une telle clause figurant dans un acte de vente, par laquelle l’ancien propriétaire déclarait n’avoir constitué aucune servitude sur le bien vendu n’avait pu mettre fin à la servitude de passage par destination du père de famille existant sur un fonds (notamment : Cass. 3ème civ. 28 avril 2009, n° 08-15.404). 

Toutefois, la Cour de cassation a rejeté l’argumentation de la copropriété en considérant que les juges du fond avaient exercé leur appréciation souveraine en donnant plein effet à la clause litigieuse de l’acte du 3 septembre 2004. 

Ainsi, une clause qui figure dans la majorité des actes valant division d’un fonds peut faire échec à l’existence d’une servitude par destination du père de famille.

Il faut donc se montrer particulièrement vigilant lorsque l’on rencontre cette clause, pourtant usuelle, par laquelle le propriétaire déclare ne connaître aucune servitude grevant son fonds. 

Au demeurant, la Cour de cassation a adopté dans son arrêt le titre subsidiaire lié à l’existence d’un chemin d’exploitation. La copropriété pourra donc espérer avoir gain de cause devant la Cour d’appel de renvoi désormais chargée de se prononcer sur l’existence d’un chemin d’exploitation.

Fort de son expertise, le Cabinet PIVOINE AVOCATS vous conseille et vous accompagne. Pour plus d’information ou afin de prendre rendez-vous, contactez-nous. 
 

Historique

<< < ... 11 12 13 14 15 16 17 ... > >>