Vérification des créances : Contestation et contenu de la lettre du mandataire Judiciaire.
Auteurs : Mathilde Bouchet, Ghislaine BETTON
Publié le :
12/10/2023
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La demande de pièces justificatives formulée par le mandataire judiciaire correspond-elle à une contestation sur l’existence, la nature ou le montant de la créance ?
À l’occasion d’un arrêt rendu le 13 septembre 2023[1], la Cour de cassation a précisé, une nouvelle fois, le formalisme et le contenu de la lettre de contestation de créance adressée par le mandataire judiciaire au créancier dans le cadre de la vérification des créances.
À l’ouverture d’une procédure collective, l’analyse du passif de la société passe par une phase de vérification des créances. Cette étape est clef puisqu’elle va permettre d’évaluer les créances et de déterminer le montant du passif. La vérification des créances est notamment assurée par le mandataire judiciaire[2]. En présence d’une créance contestée, le mandataire judiciaire va avertir le créancier intéressé et l’inviter à fournir ses explications.
Cet avertissement est formalisé par l’envoi d’un courrier avec avis de réception au créancier.
La jurisprudence a rappelé, à plusieurs reprises, que ce courrier doit reproduire les termes de l’article L.622-27 du Code de commerce à savoir :
« S'il y a discussion sur tout ou partie d'une créance autre que celles mentionnées à l'article L. 625-1, le mandataire judiciaire en avise le créancier intéressé en l'invitant à faire connaître ses explications. Le défaut de réponse dans le délai de trente jours interdit toute contestation ultérieure de la proposition du mandataire judiciaire, à moins que la discussion ne porte sur la régularité de la déclaration de créances ».
L’inertie du créancier a donc des conséquences importantes sur sa créance. En effet, non seulement le mandataire judiciaire peut solliciter le rejet de sa créance, mais surtout, si le juge-commissaire fait droit à la demande du mandataire judiciaire, le créancier sera privé de tout recours à l’encontre de cette décision.
En l’absence de réponse du créancier, se pose donc la question du contenu de la lettre du mandataire judiciaire. En effet seule la discussion portant sur la régularité de la déclaration de créance n’est pas encadrée par le délai de 30 jours.
En l’espèce, en l’absence de réponse du créancier dans un délai de 30 jours à compter de la lettre adressée par le mandataire judiciaire, le juge-commissaire a rejeté cette créance. Si la lettre du mandataire judiciaire reprenait les termes de l’article L.622-27 du Code de Commerce, elle mentionnait en objet « contestation de créance » et précisait que la créance déclarée n’était pas accompagnée de justificatifs.
Un tel contenu peut-il être assimilé à une contestation sur l’existence, la nature ou le montant de la créance ?
Si en cause d’appel, la contestation de l’ordonnance de rejet de la créance a été déclarée irrecevable, la position de la Cour de Cassation est tout autre.
La Cour de Cassation rappelle à juste titre que lorsqu’une disposition prive une partie d’une voie de recours, elle doit être interprétée strictement. Elle poursuit sa motivation en précisant que la lettre du mandataire qui se borne à solliciter des justificatifs n’est pas une lettre de contestation de l’existence, de la nature ou du montant de la créance. Le créancier ne peut ainsi se trouver privé de son droit de faire appel de l’ordonnance du juge-commissaire ayant rejeté sa créance, quand bien même aucune réponse n’a été apportée dans le délai de 30 jours en mandataire judiciaire.
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