
Rémunération indirecte du dirigeant : la qualification d’acte anormal de gestion écarté
Auteur : Barbara Brau
Publié le :
14/11/2023
14
novembre
nov.
11
2023
Amorce : Le Cabinet Pivoine Avocats vous recommande la plus grande prudence dans le cadre de la rémunération d’un holding actif par le biais d’une convention de prestations de services ou bien la rémunération d’un dirigeant. Nous revenons ici sur quelques cas de figure caractéristiques.
Dans les groupes, la question s’est souvent posée de savoir s’il fallait privilégier la rémunération d’un holding actif via une convention de prestations de services ou via une rémunération de dirigeant.
Depuis quelques années, l’Administration fiscale ne cesse de remettre en cause ce type de conventions de prestations estimant que les missions ainsi confiées relèvent des fonctions mêmes de dirigeant. En conséquence, elle a tendance à considérer que les charges correspondantes, qui résultent d’un acte anormal de gestion, ne peuvent être admises en déduction.
À titre d’exemple, a déjà été jugé que :
- Ne pouvaient être regardés comme relevant d’une gestion normale de l’entreprise, les versements forfaitaires effectués par une filiale à sa société mère au titre de l’activité du président directeur général de la société mère et de la filiale, la société mère n’ayant fourni aucune prestation de services distincte des activités que le président a réalisées dans le cadre normal de ses fonctions de dirigeant (CAA Nancy 9 octobre 2003, n° 98NC02182) ;
- L’absence de rémunération du président constituait pour la société une prise de décision de gestion opposable qui faisait en tout état de cause obstacle à ce qu’elle puisse déduire de son résultat les charges correspondant aux sommes payées à sa société mère pour des prestations de direction (CAA Paris 6 novembre 2019, n°18PA02628) ;
- Les factures, revêtues de l’unique mention « managements fees », ne contenaient aucun détail relatif à la nature et à l’importance des prestations fournies et constituaient ainsi des frais non déductibles (CAA Paris 10 octobre 2018, n° 17PA02373).
En l’espèce, une société a conclu une convention de prestations de services avec une autre société pour la réalisation, par le dirigeant de la première, de « tâches administratives et financières, le développement de son suivi managérial, de sa politique administrative, l’amélioration de ses méthodes de travail, la mise à jour de ses outils de gestion, la gestion des évolutions légales et administratives, le contrôle de sa gestion comptable et financière, ainsi que la détermination de sa stratégie opérationnelle et de développement. » Au titre de l’exercice clos en 2013, la société a comptabilisé et déduit les charges correspondant à la rémunération de ces prestations, effectuées par le co-gérant de la société prestataire et par ailleurs gérant, non rémunéré, de la société bénéficiaire des prestations.
L’administration fiscale a estimé que la convention conclue était frappée de nullité et que les charges correspondantes, qui résultaient d’un acte anormal de gestion, ne pouvaient être admises en déduction.
La Cour administrative d’appel, en adéquation avec les dernières jurisprudences, a confirmé le jugement de première instance avançant que constitue un acte anormal de gestion l’acte par lequel une entreprise décide de s’appauvrir à des fins étrangères à son intérêt (CGI art. 38 et 209). Par ailleurs, les prestations réalisées relevaient non de fonctions techniques spécifiques, mais des fonctions inhérentes à celles d’un gérant de société (au cas d’espèce d’une SARL) incluant la gestion des ressources humaines et des moyens matériels et financiers, l’élaboration, ainsi que le suivi et l’évaluation des décisions et orientations administratives et commerciales et des ressources humaines.
Le Conseil d’Etat dans un arrêt du 4 octobre 2023, (CE n° 466887) écarte la qualification d’acte anormal de gestion en présence d’une rémunération indirecte. Il est ainsi jugé que la conclusion par une société d’une convention de prestations de services avec une autre société pour la réalisation, par le dirigeant de la première, de missions relevant des fonctions inhérentes à celles qui lui sont normalement dévolues, ne relève pas d’une gestion commerciale anormale, si cette société établit que ses organes sociaux compétents ont entendu en réalité rémunérer indirectement le dirigeant et qu’ainsi ce versement n’est pas dépourvu pour elle de contrepartie. Le choix d’un mode de rémunération indirect ne caractérise pas en lui-même un appauvrissement à des fins étrangères à son intérêt.
Les termes généraux employés dans l’arrêt semblent tendre vers une application de cette règle même si la société prestataire avait été associée de la société bénéficiaire. Pour autant, nous recommandons la plus grande prudence en la matière, cet arrêt n’étant pas dans la continuité des dernières jurisprudences.
L’équipe du cabinet Pivoine Avocats peut vous accompagner et vous conseiller en la matière.
Historique
-
Rémunération indirecte du dirigeant : la qualification d’acte anormal de gestion écarté
Publié le : 14/11/2023 14 novembre nov. 11 2023Corporate, droit de sociétés, financementAmorce : Le Cabinet Pivoine Avocats vous recommande la plus grande prudence dans le cadre de la rémunération d’un holding actif par le biais d’une convention de prestations de services ou bien la rémunération d’un dirigeant. Nous revenons ici sur quelques cas de figure caractéristiques....
-
26 octobre 2023
Publié le : 13/11/2023 13 novembre nov. 11 2023Veille juridiqueVeille juridique / Contentieux des affairesIl n’y a pas lieu de différer l’application dans le temps de la règle selon laquelle la déclaration d’appel qui ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués est dépourvue d’effet dévolutif. Son application immédiate aux instances en cours ne porte pas atteinte au principe de sécurité juridique ni au droit à un procès équitable.
Cass. Chambre civile 2, 26 octobre 2023, 21-23.012, Publié au bulletin
-
26 octobre 2023
Publié le : 13/11/2023 13 novembre nov. 11 2023Veille juridiqueVeille juridique / Recouvrement de créancesIl résulte de la combinaison des articles 2241, alinéa 1, 2242 et 2244 du code civil, qu’en matière de saisie immobilière, l’effet interruptif de la prescription attaché à la délivrance de l’assignation à comparaître à l’audience d’orientation consécutive à un commandement valant saisie immobilière produit ses effets, en l’absence d’anéantissement de ce commandement ou de cette assignation, jusqu’à l’extinction de la procédure de saisie immobilière.
Cass. Chambre civile 2, 26 octobre 2023, 21-12.580, Publié au bulletin
-
18 octobre 2023
Publié le : 13/11/2023 13 novembre nov. 11 2023Veille juridiqueVeille juridique / Contentieux des affairesPrive de base légale au regard de l’article 1240 du code civil la cour d’appel qui, pour écarter la causalité entre l’exposition à un médicament et le dommage, relève qu’il n’est pas possible de déterminer si le dommage trouve sa source dans cette exposition ou dans une infection. Viole le même article l’arrêt qui, pour refuser l’indemnisation d’un préjudice d’anxiété, relève qu’il n’est pas établi que le fait générateur invoqué ait causé la réalisation du dommage.
Cass. Chambre civile 1, 18 octobre 2023, 22-11.492, Publié au bulletin
-
12 octobre 2023
Publié le : 13/11/2023 13 novembre nov. 11 2023Veille juridiqueVeille juridique / Droit bancaire et des assurancesVeille juridique / Droit économique, de la distribution et de la concurrenceLa Commission des sanctions de l’ACPR a prononcé un blâme et une sanction pécuniaire de 3,5 millions d’euros à l’encontre de la société Abeille Vie (ex Aviva Vie) pour violation de différentes obligations tenant à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (C. mon. fin., art. L. 561-1 s.).
Décision ACPR n° 2022-03 du 12 octobre 2023
-
26 octobre 2023
Publié le : 10/11/2023 10 novembre nov. 11 2023Veille juridiqueVeille juridique / Construction, immobilier et urbanismePar cette décision, la Haute juridiction apporte d’utiles précisions sur les conditions dans lesquelles le partage des frais d’état des lieux dressé par un commissaire de justice doit intervenir, sur les limites qu’il convient d’assigner à la présomption de bon état et sur l’office du juge en matière de majoration des sommes restant dues au titre du dépôt de garantie.
Cass. Chambre civile 3, 26 octobre 2023, 22-20.183, Publié au bulletin