Omission volontaire de déclaration de la cessation des paiements et interdiction de gérer
Auteurs : Maryline Benoit, Marion Fau et Ghislaine Betton
Publié le :
27/04/2022
27
avril
avr.
04
2022
Com., 12 janvier 2022, n°20-21.427
En droit des entreprises en difficulté, l’article L.653-8 alinéa 3 du Code de commerce prévoit qu’une interdiction de gérer peut être prononcée à l’encontre du dirigeant de l’entreprise sous procédure collective ayant « omis sciemment de demander l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements » – sauf à avoir demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation.
C’est précisément ce à quoi a été condamné le dirigeant à l’origine de l’arrêt de la Cour de cassation du 12 janvier 2022.
En l’espèce, une société sollicite l’ouverture d’une procédure collective et a été mise en redressement, puis en liquidation judiciaire les 6 avril et 11 mai 2016. La date de cessation des paiements avait été fixée au 1er janvier 2016, avant qu’elle ne soit reportée au 6 octobre 2014.
Le liquidateur a demandé que soit prononcée, contre le gérant de la société débitrice, une mesure d’interdiction de gérer.
La Cour d’appel de BORDEAUX a donné gain de cause au mandataire, condamnant le gérant à une interdiction de gérer de 7 ans.
Le gérant se pourvoit en cassation, faisant valoir que :
- l’omission de solliciter l’ouverture d’une procédure collective, dans le délai de 45 jours de la date de la cessation des paiements, n’est fautive que si le dirigeant a eu connaissance de cet état à la date judiciairement fixée,
- il n’aurait pas eu connaissance de la cessation des paiements au 6 octobre 2014,
- la Cour d’appel aurait violé l’article L.635-8 du Code de commerce, en retenant qu’il ne pouvait avoir conscience qu’à compter du premier trimestre 2015 de la cessation des paiements.
La Cour de cassation admet que si le gérant n’avait pas conscience de la cessation des paiements au 6 octobre 2014, il ne pouvait ignorer l’état de la société à compter du premier semestre 2015, puisque :
- il n’avait alors pas pu régler la part patronale des cotisations sociales,
- la TVA avait également cessé d’être réglée à partir du dernier trimestre 2015
- plus encore, le paiement des salaires n’était plus assuré depuis 4 mois avant l’ouverture de la procédure.
En conclusion, la circonstance que la date de cessation des paiements fixée judiciairement soit antérieure à la date où le dirigeant a eu connaissance de cet état ne fait pas obstacle à ce que celui-ci soit condamné à une mesure d’interdiction de gérer. Il suffit de démontrer que le dirigeant ne pouvait qu’avoir conscience de la cessation des paiements, afin de prouver qu’il avait sciemment tardé à déclarer cet état.
Le cabinet PIVOINE AVOCATS est à votre disposition afin de vous conseiller dans le cadre des procédures
judiciaires de traitement des difficultés de vos entreprises. Pour plus d’informations ou pour prendre rendez-vous, contactez-nous.
Historique
-
Dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire et inopposabilité du procès-verbal de réception des travaux
Publié le : 27/07/2022 27 juillet juil. 07 2022Entreprises en difficultésCour de cassation, Civ. 3e, 2 mars 2022, n° 2016787 L’ouverture d’une liquidation judiciaire emporte, pour le débiteur, dessaisissement de l’administration et de la disposition de ses biens au profit du liquidateur . Le débiteur conserve, en revanche, la maîtrise de ses droits propres,...
-
Responsabilité pour insuffisance d'actif : faute de gestion et poursuite d'une activité déficitaire
Publié le : 18/07/2022 18 juillet juil. 07 2022Entreprises en difficultésCorporate, droit de sociétés, financementCA Aix en Provence, ch. 3-2, 31 mars 2022, n021/03695 En liquidation judiciaire, la responsabilité pour insuffisance d’actif du dirigeant peut être prononcée si trois conditions cumulatives sont réunies : Une insuffisance d’actif, c’est-à-dire un actif disponible insuffisant pour couvr...
-
Procédures collectives : la disparition du fonds de commerce du débiteur n’entraine pas la résolution du plan de redressement
Publié le : 22/06/2022 22 juin juin 06 2022Entreprises en difficultésCom., 2 février 2022, n°20-20.199 L’article L.626-27 du Code de commerce dispose que « Le Tribunal qui a arrêté le plan peut, après avis du Ministère public, en décider la résolution si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan. Lorsque la cessation de...
-
Non-application du principe de l’interdiction de reprise des poursuites au conjoint commun en biens
Publié le : 20/06/2022 20 juin juin 06 2022Entreprises en difficultésCom., 2 février 2022, n°20-18.791 L’article L.643-11 du Code de commerce pose le principe d’interdiction de reprise des poursuites individuelles à la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif, selon lequel « le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffi...
-
Compétence du Tribunal judiciaire en matière de responsabilité du mandataire liquidateur
Publié le : 13/05/2022 13 mai mai 05 2022Entreprises en difficultésSoc., 19 janvier 2022, n°19-19.313 Les mandataires de justice sont susceptibles d’engager leur responsabilité civile professionnelle dans le cadre de l’exécution de leur mandat, à l’égard des créanciers voir du débiteur lui-même. Le risque le plus important pour le mandataire judiciaire...
-
Omission volontaire de déclaration de la cessation des paiements et interdiction de gérer
Publié le : 27/04/2022 27 avril avr. 04 2022Entreprises en difficultésCom., 12 janvier 2022, n°20-21.427 En droit des entreprises en difficulté, l’article L.653-8 alinéa 3 du Code de commerce prévoit qu’une interdiction de gérer peut être prononcée à l’encontre du dirigeant de l’entreprise sous procédure collective ayant « omis sciemment de demander l’ouvert...