
Procédure pénale : La Cour de cassation précise la responsabilité de la société absorbante pour une infraction commise par une société absorbée.
Auteurs : Claire Garcia, Bastien Girard Nkouikani et Ghislaine Betton
Publié le :
30/01/2023
30
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01
2023
Cass. Crim., 13 avril 2022 / n° 21-80.653
Dans une précédente décision du 25 novembre 2020, la Cour de Cassation avait jugé qu’en cas de fusion-absorption d’une société par une autre société, la société absorbante pouvait être condamnée pénalement pour une infraction commise par la société absorbée avant l’opération. Par cette décision, elle avait opéré un revirement de jurisprudence et s’était aligné sur la position de la Cour de Justice européenne (CJUE, 5 mars 2015, aff. C-343/13) et celle de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH 1er oct. 2019, n° 37858/14).
L’ensemble des fusions postérieures à l’arrêt, soit au 25 novembre 2020 étaient concernées par ce revirement, outre celles qui, quelles que soient leurs formes et quelle que soit la date de la fusion – ont fusionné en fraude à la loi, la fusion n’ayant pour seul objet que de faire échec aux poursuites pénales à l’encontre de la société absorbée.
Par un nouvel arrêt du 13 avril 2022, les juges du quai de l’horloge consacrent l’application dans le temps de ce revirement de jurisprudence en rappelant la nécessité pour le juge d’instruction, y compris d’office, de rechercher l’existence d’une fraude à la loi pour les fusions intervenues avant le 25 novembre 2020.
En l’espèce, en 2005, une société, a fait l’objet d’une fusion ayant consisté en une dissolution sans liquidation et un transfert universel de patrimoine vers une autre société.
En 2014, un particulier a porté plainte contre la société absorbée pour un recel d’abus de biens sociaux commis à l’occasion d’une opération de promotion immobilière s’étant déroulée à compter de 1991.
La plainte avait abouti à un non-lieu prononcé par le juge d’instruction à raison de la dissolution de la société absorbée, et ce malgré la constatation de l’existence de charges suffisantes caractérisant l’infraction. Ce non-lieu a été contesté par le requérant.
La cour d’appel pour rejeter la contestation avait maintenu l’ancienne jurisprudence de la Cour de cassation (Crim. 25 oct. 2016, n° 16-80.366) selon laquelle, en application du principe de la personnalité des peines, la Haute juridiction refusait qu’une société absorbante soit poursuivie et condamnée pour des faits commis par la société absorbée avant la fusion.
La cour d’appel avait donc choisi de maintenir cette ancienne jurisprudence en mettant en avant le principe de prévisibilité juridique sans se prononcer sur une éventuelle fraude à la loi résultant de la fusion.
La Cour de cassation censure le raisonnement de la cour d’appel en faisant une application de la théorie de la fraude à la loi et de ses effets en droit pénal. Peu importe l’ancienneté des faits, il revenait aux juges du fond de rechercher, y compris d’office, la présence d’une fraude à la loi permettant au revirement de jurisprudence de s’appliquer rétroactivement.
La position de la Cour de Cassation interroge toutefois au regard du principe de la non rétroactivité de la loi pénale, doit on considérer que ce principe s’efface totalement en présence d’une fraude ? Et si tel est le cas, cette jurisprudence trouverait elle à s’appliquer dans des situations voisines sans transmission universelle de patrimoine, comme la cession d’actifs précédant la dissolution d’une société ayant pour objet de faire échec aux poursuites pénales à l’encontre de la société dissoute ?
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