
Délivrance d’attestation d’assurance trompeuse et responsabilité délictuelle de l’assureur
Auteurs : Dylan DUVERGT, Virginie MAUVE, Ghislaine BETTON
Publié le :
27/07/2022
27
juillet
juil.
07
2022
Cass. Civ. 3ème, 11 mai 2022, n°20-17.293
L’engagement de la responsabilité de l’assureur par un tiers, que représente ici le maître d’ouvrage, ne peut se faire que sur le fondement de l’article 1240 du code civil selon lequel : « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. ».
Partant de ce texte, la jurisprudence contemporaine érige une responsabilité délictuelle de l’assureur, à l’égard des tiers, lorsqu’il délivre une attestation d’assurance de nature à tromper ceux-ci sur la nature ou l’étendue d’une garantie.
Ainsi, selon la Haute juridiction, engage sa responsabilité l’assureur qui délivre une attestation d’assurance pendant une période de suspension de garantie de son assuré sans préciser le risque de résiliation de la garantie (Cass. Civ. 3ème, 24 octobre 2012, n°11-16.012).
Il en va de même lorsque l’attestation litigieuse comporte une imprécision sur l’activité professionnelle exercée par l’assuré (Cass. Civ. 3ème, 29 mars 2006, n°05-13.119).
C’est dans ce contexte que la décision étudiée intervient et ajoute une pierre à l’édifice en précisant encore davantage les subtilités qui peuvent mener à une action en responsabilité délictuelle contre un assureur.
En l’espèce, un maître d’ouvrage personne physique a confié la réalisation de travaux d’aménagement et d’extension de sa maison à une société placée en cours de liquidation judiciaire en cours du chantier.
A la suite d’une expertise judiciaire concluant que « les travaux étaient inachevés, affectés de multiples désordres et que les malfaçons étaient telles qu’elles imposaient la démolition et la reconstruction de l’ouvrage », le maître d’ouvrage a assigné l’assureur aux fins d’indemnisation.
Pour écarter le caractère trompeur de l’attestation d’assurance, la Cour d’appel d’Agen retient que celle-ci ne peut engager l’assureur en dehors des limites du contrat auquel elle se réfère en ce qu’elle ne constitue qu’une « présomption simple d’assurance pour les périodes indiquées ».
Cette position reprend celle adoptée par la Cour de cassation quelques mois plus tôt (Cass. Civ. 3ème, 20 octobre 2021, n°20-18.533), selon laquelle l’assureur peut opposer aux tiers les clauses de limitation et d’exclusion présentes dans les conditions générales du contrat le liant avec l’assuré.
C’est sans revenir sur sa solution antérieure que la Cour de cassation casse, sur ce point, l’arrêt rendu en appel.
Les juges du droit s’appuient sur un point important pour fonder leur décision.
L’attestation d’assurance mentionnait une garantie très générale couvrant la « responsabilité civile avant livraison des biens et/ou réception des travaux » quand seuls l’effondrement et le risque d’effondrement étaient couverts par l’assurance pour la période antérieure à la réception des travaux.
La Haute juridiction relève de manière implicite que cette garantie n’est pas une assurance responsabilité mais une assurance de choses.
Il en résulte que l’assuré ne disposait pas d’une garantie de sa responsabilité civile pour la période antérieure à la fin des travaux contrairement à ce qu’indiquait l’attestation litigieuse.
C’est pourquoi, la Cour de cassation a admis le caractère trompeur de l’attestation en ce qu’elle a induit le maître de l’ouvrage en erreur sur la couverture d’assurance de son cocontractant.
La cour d’appel de renvoi aura à apprécier le lien de causalité entre cette faute de l’assureur et le préjudice subi par le maître d’ouvrage.
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