
ÉLARGISSEMENT DES MODES DÉCISIONNELS ET CONSÉCRATION DE LA VOIE ÉLECTRONIQUE DANS LE CADRE DE LA GOUVERNANCE DES SOCIÉTÉS CIVILES ET COMMERCIALES
Auteur : Kentin BEDOUIN & Barbara BRAU
Publié le :
07/11/2024
07
novembre
nov.
11
2024
La loi n°2024-537 du 13 juin 2024, à l’instar de la loi PACTE, se veut porteuse d’une vision rénovée de l’entreprise. Dans cette loi « fourre-tout » se côtoient diverses dispositions concernant le droit des titres, la compétence de la Cour d’Appel de Paris, le droit bancaire, le droit monétaire et financier et le droit des sociétés.
Dans ce dernier domaine que nous développerons ici, plusieurs dispositions, entrant en vigueur le 15 juin 2024 pour certaines et le 14 septembre 2024 pour d’autres, concernent les sociétés anonymes. Nous ne ferons ici que les lister sans entrer dans le détail :
- Dans les sociétés non cotées, (i) possibilité pour les membres du Conseil d’Administration (CA), membres du Conseil de Surveillance (CS) de participer aux réunions par un moyen de télécommunication sauf disposition contraire des statuts ou du règlement intérieur ; (ii) possibilité pour les statuts de limiter les décisions pouvant être prises ainsi ou de prévoir un droit d’opposition au profit d’un nombre déterminé de décisions ; (iii) réhaussement de 5 à 25 % du seuil d’opposition à la dématérialisation intégrale de l’AGE ;
- Dans les sociétés cotées, (i) il est nécessaire d’énumérer dans les statuts ou le règlement intérieur les décisions dont la délibération et l’adoption sont inaccessibles à la télécommunication (visioconférence, téléphone…) ; (ii) les AG doivent être retransmises en direct ou en différé ; (iii) assouplissement du mode de fixation du prix de souscription ; (iv) faculté de désignation par le CA ou le Directoire des bénéficiaires d’une augmentation de capital réservée jusqu’à 30 % du capital social par an ;
- Suppression de la référence à visioconférence au profit de la seule référence aux moyens de télécommunication ;
- Les statuts peuvent prévoir la possibilité pour le CA ou le CS de prendre tout type de décisions ou certaines d’entre elles, par voie de consultation écrite, sous réserve qu’aucun membre ne s’y oppose ;
- Extension de ces mesures aux assemblées spéciales ;
- Possibilité dans les CS de nommer plusieurs vice-présidents (entrée en vigueur le 15 juin 2024) ;
- Fixation par décret du seuil en dessous duquel les fonctions du Directoire peuvent être dévolues à un Directeur Général unique ;
- Suppression de l’obligation pour le CA et le Directoire de considérer les enjeux « culturels et sportifs » (entrée en vigueur le 15 juin 2024) ;
- Possibilité pour le CA et le Directoire de mettre en conformité les statuts avec les nouveaux textes législatifs et réglementaires, sans AGE préalable, mais avec ratification de cette dernière (entrée en vigueur le 15 juin 2024) ;
- Réhaussement des seuils de délégation dans le cadre d’augmentation de capital par apport en nature ;
- Faculté d’émettre des actions de préférence à droit de vote multiple lors d’une introduction en bourse.
Nous nous intéresserons ici, plus en détail, aux dispositions prises en droit des sociétés et intéressant plus particulièrement les sociétés civiles, SNC et SARL.
Approbation des comptes annuels au sein de la SARL
Auparavant, il était obligatoire, au sein d’une SARL, d’approuver les comptes par voie d’assemblée générale. L’article L223-27 alinéa 1er du code de commerce interdisait aux associés d’une SARL d’approuver les comptes annuels par le biais de consultation écrite ou par acte unanime des associés.Désormais, et depuis le 14 septembre 2024, il est possible de prendre toutes décisions y compris celles concernant l’approbation des comptes par voie de consultation écrite ou par acte unanime. Pour autant, les statuts devront être modifiés en ce sens.
Décisions collectives des associés
Le législateur consacre l’utilisation de la voie électronique dans la prise de décisions des associés de société civiles, SNC et SARL (entrée en vigueur le 14 septembre 2024).L’article L 221-6 alinéa 2 du code de commerce pour les SNC, l’article 1853 du Code civil pour les sociétés civiles et l’article L223-27 alinéa 1er du code de commerce pour les SARL sont ainsi complétés :
(…) toutes les décisions ou certaines d'entre elles peuvent être prises par consultation écrite des associés y compris, dans ces cas, par voie électronique, selon les délais et les modalités qu'ils définissent.
Pour les SARL, la réforme englobe également la prise de décision par acte unanime des associés, « y compris, dans ces cas, par voie électronique, selon les délais et les modalités » définis par les statuts.
Les statuts devront également être modifiés en ce sens et prévoir les délais et modalités d’application.
Il conviendra également d’articuler ces nouvelles dispositions législatives avec les dispositions réglementaires existant déjà et encadrant les modalités d’envoi des résolutions et documents, l’accusé réception, le délai de réponse…
Vote par correspondance
Désormais et depuis le 14 septembre 2024, les statuts de SARL, peuvent admettre le vote par correspondance au moyen d'un formulaire dont les mentions sont déterminées par décret en Conseil d'Etat.Il sera donc désormais possible, comme c’est le cas dans le cadre d’une SA, de prévoir dans les statuts d’une SARL la faculté pour les associés de voter en assemblée par correspondance, c’est-à-dire à distance.
Toutes ces nouveautés apportées par la loi du 13 juin 2024 restent des possibilités, à nécessairement prévoir dans les statuts, à l’exception de la validité des actes unanimes d’associés réalisé par voie électronique. En effet, l’article 1366 du code civil prévoyant que l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit manuscrit, le consentement des associés d’une société recueilli par voie électronique était déjà admis.
Enfin, la loi du 13 juin 2024 instaure quelques nouveautés, s’agissant par exemple de la possibilité pour une SAS coopérative d’émettre des titres participatifs, élargit les droits et titres pouvant être inclus dans un PEA, modifie les sociétés relevant du régime de l’ESS, harmonise les règles applicables pour la prise en compte des voix en cas de votes nuls ou blancs dans les assemblées d’obligataires.
L’équipe du cabinet Pivoine Avocats suit de près l’application de cette loi et se tient à vos côtés pour vous accompagner et vous conseiller.
Historique
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