
Poursuites individuelles et arrêté du plan de sauvegarde
Auteur : Marion Fau et Donatella Toschi
Publié le :
07/12/2022
07
décembre
déc.
12
2022
Par une affaire en date du 7 septembre 2022, la Haute juridiction est venue préciser clairement tous les aspects pratiques quant à l’interruption des poursuites individuelles d’un créancier soumis à la discipline collective.
En l’espèce, le directeur commercial d’une société a démissionné le 27 novembre 2007 et a créé, le 28 février 2008 – soit quelques mois plus tard – une nouvelle société exerçant une activité concurrente, en partenariat avec 2 autres entreprises.
L’ancien directeur commercial et les 3 sociétés ont été assignés par l’ancien employeur, leur reprochant d’avoir commis des actes de concurrence déloyale par détournement d’informations confidentielles et de clients, ainsi que le débauchage de son personnel et de sous-traitance illicite.
Les difficultés financières ont rattrapé ces parties quelques années plus tard. En effet,
- La 1re société a fait l’objet d’une procédure de sauvegarde, le 19 août 2014 dans le cadre duquel un plan a été arrêté par jugement du 12 avril 2016 ;
- La 2e société a été placée en liquidation judiciaire le 20 janvier 2015 ;
- La 3e société a été placée en redressement judiciaire le 7 février 2017 et un plan a été arrêté puis clôturé le 29 novembre 2017. Simultanément, elle a fait l’objet d’une fusion-absorption par la 1re société, puis d’une radiation du Registre du Commerce et des Sociétés.
L’objet du pourvoi en cassation formé par la société débitrice portait sur une telle condamnation.
Par sa décision en date du 7 septembre 2022, la Cour de cassation a censuré l’arrêt d’appel au visa des articles suivants :
- Le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L.622-17 du Code de commerce et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent (article L.622-21 du Code de commerce) ;
- Les instances en cours sont interrompues jusqu’à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance ; elles sont alors reprises de plein droit mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant (article L.622-22 dudit Code).
Ainsi, la condamnation de la société débitrice à payer la créance indemnitaire de la société victime des actes de concurrence déloyale, née antérieurement au jugement d’ouverture alors que la décision arrêtant le plan de sauvegarde ne met pas fin à la suspension des poursuites individuelles, viole les textes susvisés.
La décision a été l’occasion pour la Cour de cassation de rappeler que le jugement arrêtant un plan ne remet pas en cause le principe de l’arrêt des poursuites individuelles. L’action tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent en cours à l’ouverture de la procédure, sera reprise de plein droit après déclaration du créancier mais ne peut tendre qu’à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.
Historique
-
Poursuites individuelles et arrêté du plan de sauvegarde
Publié le : 07/12/2022 07 décembre déc. 12 2022Entreprises en difficultésPar une affaire en date du 7 septembre 2022, la Haute juridiction est venue préciser clairement tous les aspects pratiques quant à l’interruption des poursuites individuelles d’un créancier soumis à la discipline collective. En l’espèce, le directeur commercial d’une société a démissionné...
-
L’application du principe de subsidiarité de l’AGS en redressement et liquidation judiciaires
Publié le : 28/11/2022 28 novembre nov. 11 2022Entreprises en difficultésDans le cadre des procédures de redressement et de liquidation judiciaires, le mandataire / liquidateur judiciaire n’a pas à justifier des fonds dont il dispose pour solliciter la prise en charge des créances salariales par l’AGS, cette dernière ne pouvant refuser la prise en charge en opposa...
-
Banqueroute et action civile
Publié le : 04/11/2022 04 novembre nov. 11 2022Entreprises en difficultésDans une décision du 22 juin 2022, la Cour de cassation a rappelé que les créanciers et actionnaires d’une société débitrice ne peuvent se constituer partie civile en matière de banqueroute, que s’ils invoquent un préjudice distinct du montant de la créance déclarée dans le cadre de la procéd...
-
Action en résolution d'un contrat pour inexécution d'une obligation autre que le paiement d'une somme d'argent
Publié le : 26/10/2022 26 octobre oct. 10 2022Entreprises en difficultésPar une décision en date du 15 juin 2022 (Com., 15 juin 2022, n°21-10.802), les Sages du quai de l’Horloge ont apporté des précisions concernant l’action en résolution d’un contrat pour inexécution d’une obligation autre que le paiement d’une somme d’argent. En l’espèce, suivant un acte a...
-
Liquidation judiciaire : l’action en réduction d’une donation-partage échappe au dessaisissement du débiteur
Publié le : 26/10/2022 26 octobre oct. 10 2022Entreprises en difficultésLe 2 mars 2022, la chambre commerciale de la Cour de Cassation est, une nouvelle fois, venue préciser la portée du dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire. L’article L.641-9 I du Code de commerce prévoit que : « le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emp...
-
Manque de vigilance du dirigeant et responsabilité pour insuffisance d’actif
Publié le : 28/09/2022 28 septembre sept. 09 2022Entreprises en difficultésCour de cassation, Chambre commerciale, 13 avril 2022, 20-20.137 Lorsque l’actif d’une société placée en liquidation judiciaire se révèle insuffisant pour désintéresser l’ensemble des créanciers, le liquidateur judiciaire peut assigner le dirigeant en responsabilité pour insuffisance d’act...