
Distinction subtile sur la responsabilité du banquier
Auteurs : Violaine Reymond, Elisa Teyssier,Ghislaine Betton
Publié le :
12/11/2020
12
novembre
nov.
11
2020
Des subtilités à découvrir !
Par deux arrêts du 23 septembre 2020, la Haute juridiction a jugé que l’article L650-1 du Code de commerce ne pouvait pas fonder une action en responsabilité des établissements de crédit ayant réduit, voire retiré, les concours bancaires consentis à une société, ayant fait l’objet par la suite d’une procédure collective.
Pour ces deux litiges, les juges du fond ont écarté la responsabilité du banquier à raison du retrait de concours bancaires consentis à des sociétés, ayant par la suite fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire, sur le fondement de l’article L 650-1 du Code de commerce, en retenant que les conditions de la responsabilité issue de ce texte n’étaient pas réunies.
Ils ont, cependant, étaient censurés par la Haute juridiction, non parce qu’elle estime que la responsabilité aurait dû être retenue mais parce qu’elle considère qu’ils auraient dû être encore plus strict sur l’interprétation et l’application de ce texte.
L’erreur de raisonnement consiste à avoir vérifié si les conditions des cas de responsabilité issus de ce texte étaient remplies, sans s’arrêter au préalable sur le champ d’application global.
« Lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci. ».
La Cour de cassation casse les deux arrêts pour violation de la loi par fausse application, et déduit de la lettre de l’article que : « les dispositions de l’article L. 650-1 du Code de commerce ne concernant que la responsabilité du créancier lorsqu’elle est recherchée du fait des concours qu’il a consentis, seul l’octroi estimé fautif de ceux-ci, et non leur retrait, peut donner lieu à l’application de ce texte ».
Or, dans les affaires en causes, les parties ne soulevaient pas une responsabilité du fait de l’octroi de concours bancaires, mais du fait de leur retrait, tantôt partiel (n°18-23.221), tantôt total (n°19-12.542).
Cette lecture restrictive de l’article L 650-1 du Code de commerce paraît justifiée par le fait que cette disposition constitue une dérogation au principe même de la responsabilité civile, plus complexe à mettre en œuvre au regard des moyens de preuves à rapporter.
Ainsi, dans le cas de réduction ou de retrait des concours consentis, les débiteurs et cautions pourront faire valoir que la diminution du concours a été fautive et qu’elle leur a causé un dommage sur le terrain de la responsabilité classique.
Pour obtenir gain de cause, ils devront suivre les règles usuelles de l’action en responsabilité civile (faute – préjudice – lien de causalité), sans avoir à justifier en plus de l’un des trois critères listés par l’article L 650-1, à savoir fraude, immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou garanties disproportionnées.
Il semble donc que ces décisions, qui pourraient paraître favorables aux établissements de crédit à première vue, aient, en réalité, pour conséquence de rendre plus aisé la recherche de leur responsabilité en réduisant le champ d’application de l’article L 650-1 et de ses cas limitatifs de responsabilité.
Fort de son expertise, le Cabinet Pivoine Avocats vous accompagne dans toutes problématiques que vous pourriez rencontrez dans vos relations avec les établissements de crédit et autres partenaires financiers.
Pour plus d’informations ou prendre rendez-vous, n’hésitez pas à nous contacter.
Cass. Com., 23 septembre 2020, n°18-23.221 et Cass. Com., 23 septembre 2020, n°19-12.542
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